Le 19 mai dernier le gouvernement italien a approuvé un nouveau décret, dit « Décret  Relance», portant différentes mesures visant à relancer l’économie italienne après la sortie de la crise liée au Covid19. Son dispositif s’adresse tant aux entreprises et entrepreneurs du secteur privé, qu’aux personnes publiques, aux travailleurs indépendants ou salariés, ainsi qu’aux familles. Il touche de multiples secteurs de l’économie, y compris le tourisme, le sport, l’agriculture et la pèche.

Concernant les entreprises, les travailleurs et les investisseurs privés, ces mesures prennent la forme, soit d’exonérations fiscales ou allocations de crédits d’impôt (A), soit de différents fonds et subventions (B) ou de dispositions au soutien de l’emploi modifiant les règles du droit du travail (C), dont les principales sont décrites ci-après :

A) Exonérations fiscales et allocations de crédits d’impôt

  • Exonérations en matière d’IRAP (taxe régionale pour les activités productives)

Les entreprises et les travailleurs indépendants dont les revenus n’ont pas dépassé le seuil de 250 millions d’euros dans le dernier exercice fiscal sont exonérés du paiement du solde de la taxe relative à l’année 2019 et de l’acompte (40%) dû pour l’année 2020.

  • Crédits d’impôt pour les investisseurs et autres mesures favorisant l’augmentation du capital social des sociétés

Le Décret Relance vise à favoriser les apports en numéraire dans le capital social des entreprises de taille moyenne (revenus de l’année 2019 compris entre 5 et 50 millions d’euros), et qui ont subi en mars et avril 2020, en raison de la crise liée au COVID-19, une réduction globale des recettes par rapport à la même période de l’année précédente d’au moins 33 %. Sont exclues celles qui opèrent dans le secteur bancaire.

Les apports, dans la limite de 2 millions d’euros, bénéficieront d’un crédit d’impôt à hauteur de 20%. Cette mesure s’applique pour les augmentations de capital délibérées et réalisées en numéraire et entièrement libérées depuis l’entrée en vigueur du Décret et avant le 31 décembre 2020. Les parts sociales ou actions ainsi acquises doivent être conservées jusqu’au 31 décembre 2023.

En outre, les sociétés visées ci-dessus pourront bénéficier, après l’approbation des comptes de l’exercice 2020, d’un crédit d’impôt égal à 50% des pertes excédant une valeur correspondante à 10% des fonds propres, dans la limite de 30% de l’augmentation de capital et en tout état de cause dans les limites prévues par le décret (800.000 euros, sauf exceptions). La distribution de tout type de réserves avant le 1er janvier 2024 entraînera, pour les sociétés ayant bénéficié du dispositif, la perte de ce bénéfice et l’obligation de payer le montant correspondant au crédit d’impôt assorti des intérêts légaux.

Le Décret Introduit également un régime fiscal favorable pour les personnes physiques investissant dans les start-up ou les PME innovantes : les investisseurs peuvent en effet bénéficier d’une déduction fiscale de 50% des apports en capital. L’investissement maximum déductible ne peut dépasser, pour chaque exercice, le montant de 100.000 euros et doit être maintenu pendant au moins trois ans.

  • Loyers et crédit d’impôt

Les personnes exerçant une activité commerciale, artistique ou professionnelle, qui ont subi en mars, avril et mai 2020 une diminution du chiffre d’affaires d’au moins 50% par rapport au même mois de l’année 2019 et dont le chiffre d’affaires n’a pas dépassé les 5 millions d’euros au cours du dernier exercice, peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt égal à 60 % du loyer de leur bail commercial, payé pour les mois en question.

Les hôtels et les agritourismes peuvent bénéficier du crédit d’impôt quel que soit le volume des recettes enregistrées au cours de la période fiscale précédente.

Ce crédit d’impôt ne se cumule pas avec celui déjà prévu par d’autres dispositions similaires en faveur des magasins et ateliers.

B) Fonds, subventions et financement des investissements

  • Versements de l’Etat à fond perdu

Les entreprises dont le chiffre d’affaires du dernier exercice fiscal est inférieur à 5 millions d’euros et dont celui du mois d’avril 2020 est inférieur aux deux tiers de celui du mois d’avril 2019 (cette dernière condition est requise uniquement pour les activités démarrées avant le 1er janvier 2019) sont éligibles à une subvention de l’Etat, dont le montant est déterminé comme suit:

  • 20 % de la différence entre le montant du chiffre d’affaires des mois d’avril 2019 et avril 2020, pour les personnes dont les revenus déclarés pour le dernier exercice clos n’ont pas dépassé le seuil de 400.000 euros ;
  • 15 % en cas de revenus supérieurs au seuil précité et ne dépassant pas le million d’euros au cours du dernier exercice clos ;
  • 10 % en cas de revenus supérieurs au million d’euros et ne dépassant pas les cinq millions d’euros.

La subvention ne sera pas assujettie à l’impôt sur le revenu.

  • Financement des souscriptions d’instruments financiers

Il a été créé un fonds («Fondo Patrimonio PMI »)  destiné à financer la souscription, avant le 31 décembre 2020 et dans les limites de la dotation du fonds, de nouvelles obligations ou de titres de créance nouvellement émis dans les petites et moyennes entreprises, dans les conditions fixées par le Décret. Ces instruments financiers sont remboursés six ans après leur souscription, mais avec la possibilité pour la société émettrice de les racheter après trois ans.

  • Fonds « pour la sauvegarde des niveaux d’emploi et la promotion des activités économiques »

Il a été créé un fonds, avec une dotation de 100 millions d’euros pour l’année 2020, destiné à sauver et restructurer, par des investissements dans le capital-risque, les entreprises qui possèdent des marques historiques d’intérêt national ainsi que les sociétés de capitaux employant au moins 250 salariés et qui se retrouvent en difficulté économique.

  • Fonds en faveur des start-up et PME innovantes

Le Gouvernement a également créé un fonds « pour le transfert de technologie » visant à financer la recherche et les projets d’innovation et implémenter ceux déjà existant, parmi lesquels le Fonds de soutien au capital-risque pour encourager les investissements et la souscription de titres et participations dans les start-up et PME innovantes.

C) Mesures au soutien de l’emploi

  • Prorogation des mesures en matière de « Cassa Integrazione Guadagni » 

Le dispositif dénommé «Cassa Integrazione Guadagni » (CIG), comparable sous certains aspects au chômage partiel français, a été, comme ce dernier, implémenté et simplifié pour tenir compte de l’urgence liée à la suspension ou la réduction de l’activité d’entreprise en raison de la crise sanitaire. Les conditions et la procédure d’accès à ce dispositif ont été sensiblement allégées pendant une durée initiale de neuf semaines à compter du 23 février 2020.

Malgré la sortie du lock-down, le Décret a prorogé la possibilité d’accéder à la CIG « simplifiée » pour cinq semaines supplémentaires. Le dispositif peut être mis en œuvre jusqu’au 31 août 2020, plus quatre autres semaines, pour être utilisé uniquement et sauf exceptions (entreprises des secteurs du tourisme, des foires et congrès, des parcs d’attractions, théâtres et cinémas) sur la période allant du 1er septembre 2020 au 31 octobre 2020 à condition que la suspension ou réduction de l’activité persistent pendant cette période. Il a été néanmoins réintroduit l’obligation, pour les employeurs, d’informer et consulter les syndicats ou les représentants syndicaux au sein de l’entreprise, préalablement à la mise en place de la CIG spéciale Covid19. Cette consultation peut être réalisée également par voie électronique.

  • Prorogation de l’interdiction de licencier

Le Décret prolonge jusqu’au 17 août 2020 la période fixée par le décret-loi « Cura Italia » du 17 mars dernier, pendant laquelle les licenciements individuels pour motif économique et les licenciements collectifs sont interdits, tandis que les procédures de licenciement déjà en cours à cette date restent suspendues.

En outre, le Décret prévoit pour l’employeur la possibilité de révoquer les licenciements pour motif économique notifiés au cours de la période allant du 23 février 2020 au 17 mars 2020, à condition de demander le bénéfice rétroactif de la CIG à partir de la date à laquelle le licenciement a pris effet. Dans ce cas, la relation de travail est réputée rétablie sans interruption, ni frais ou pénalités pour l’employeur.

  • Autres dispositions exceptionnelles en matière de droit du travail

Il est possible de renouveler ou de prolonger jusqu’au 30 août 2020 les contrats de travail à durée déterminée conclus avant le 23 février 2020, même en l’absence des conditions restrictives normalement prévues par la loi italienne et encadrant la conclusion d’un CDD.

Le Décret prévoit enfin différentes dispositions d’application temporaire, favorisant la prise de congés, rémunérés ou pas, pour les salariés parents d’enfant mineurs et d’autres encourageant le télétravail. Ainsi, ses conditions d’application ont été assouplies rendant inutile un accord d’entreprise ou individuel. Le travail peut par ailleurs être effectué à l’aide d’outils informatiques appartenant au salarié.